La chronologie de la controverse

En 1833, le premier voyage touristique organisé en Méditerranée est proposé par la Steam Society sur le vapeur napolitain Francesco 1er. Cette pratique devient par la suite une activité régulière dès 1840 lors de la création de la première agence de voyage par Thomas Cook permettant de voyager à travers le territoire britannique. Un premier circuit touristique proposant une traversée du continent européen est mis en place en 1855.

Après la Seconde Guerre mondiale, la population a plus de temps libre, le pouvoir d’achat augmente, et l’extension du salariat permet la hausse du nombre de vacanciers. Des concepts de voyages en croisières variés se mettent en place. En 1948, la compagnie de croisières Costa largue pour la première fois les amarres depuis le port de Gênes pour rejoindre Buenos Aires.

La ville commence à développer un plan stratégique visant à s’imposer sur le marché international des croisières. Les collectivités locales comme la CCI et la Métropole de Marseille s’investissent en élaborant le Programme de développement sur cinq ans du Port autonome de Marseille (PAM) en 1992. Un an plus tard, la “Charte de la croisière” est rédigée, plaçant la croisière dans une dimension commerciale et industrielle.

Cette association loi 1901 a été créée par Jacques Truau et se compose de 5 salariés permanents et d’un président bénévole. Son action repose notamment sur la promotion de la ville auprès des opérateurs, l’accueil des passagers et s’occuper des installations portuaires et autres services en lien avec la demande des opérateurs. Le but de ce club est de faire de la croisière un atout économique majeur pour la Provence.

Le port de Marseille a été inauguré au sein de la gare maritime le Marseille Provence Cruise Terminal dans le 15ème arrondissement. Ce dernier est spécialement conçu pour les croisières. Il est doté de parkings, de points d’accès à l’aéroport international, à la gare TGV et est connecté au réseau autoroutier. Depuis 2013, on y compte plus d’1 million de passagers chaque année, ce qui l'élève au rang de terminal croisière numéro 1.

La croissance du nombre de croisiéristes s'accélère à partir du début des politiques volontaristes (fin des années 90’), permettant de développer son attractivité industrielle et touristique. Avec plus d’un million de croisiéristes, Marseille se place en position dominante sur le marché français. Il est également à la sixième place en Méditerranée, avec plus d’un million de croisiéristes après les ports italiens Civitavecchia, Venise et le port espagnol Barcelone notamment.

L’organisation à but non lucratif Transport & Environnement, promouvant le transport durable en Europe, a publié une étude en juin 2019. Selon elle, 57 navires en escale à Marseille émettent autant d’oxyde nitreux (NOx) qu’un quart des 340 000 voitures en circulation dans la ville. Cette proportion s’explique par des normes souples concernant les carburants marins au soufre, malgré leurs conséquences écologiques néfastes.

Selon l’observatoire de la qualité de l’air en Région Sud AtmoSud, 20% des émissions d'oxydes d'azote d'origine maritime sont liées aux paquebots de croisière. Un rapport de l’observatoire révèle que ces émissions ont dépassé pour la première fois en 2018 celles d’origines routières dans la métropole d’Aix-Marseille. AtmoSud définit alors un programme de surveillance des ports sur la période 2018-2021 avec le soutien avec la Région et en collaboration avec l’ensemble des acteurs portuaires et associatifs locaux.

Costa Cruises, MSC Croisières, Royal Caribbean Cruises Limited et Ponant, se sont engagés, au côté du ministère de la transition écologique, de la Région Paca et de la Métropole Aix-Marseille-Provence, à diminuer les émissions de polluants atmosphériques, notamment dans le cadre du plan « Escales Zéro Fumée » qui vise l’électrification à quai. Il s’agit, par exemple, dans la zone d’entrée et de sortie du port, de réduire la vitesse à 10 nœuds et d’utiliser du diesel marin à 0,1% de soufre.

Des ateliers thématiques ont lieu les 17, 19 et 25 septembre 2019 comme concertations avec des habitants, associations et collectivités locales sur le vivre-ensemble de la ville et du port de Marseille. L’objectif est de répondre à la demande des populations riveraines d’être informées et impliquées dans les projets susceptibles d’impacter leur vie.

Le navire de croisière Diamond-Princess est placé en quarantaine dans le port de Yokohama (Japon) après la découverte de cas de coronavirus à bord. Les 2666 passagers sont alors confinés dans leurs cabines pendant 14 jours. Alors que le marché mondial de la croisière était en phase de croissance importante, l’activité des navires de croisière de l’UE s’est vu diminuer d’environ 85% en 2020.

Après 17 mois d’arrêt sur décision du gouvernement français, les activités touristiques de croisière sont relancées par MSC Croisières et Costa Croisières, avec deux départs les 20 et 27 juin afin de tester les protocoles anti-Covid. Des protocoles sanitaires renforcés avec des équipages et des croisiéristes testés et présentant un test PCR négatif sont établis. Des jauges ainsi que des excursions dans des endroits moins affluents sont imposées pour limiter les flux.

Des habitants de la ville se réunissent pour créer le collectif Stop Croisières ayant pour but l’arrêt des croisières à Marseille et du trafic maritime. L’organisation relève que les croisières seraient responsables de 20 à 30% des émissions d’azote et de 2500 morts par an. De plus, les retombées économiques des croisières seraient discutables. Stop Croisières mène des actions remarquées comme le 14 juin dernier, lorsque des militants ont bloqué l’accès au port à deux des plus gros paquebots du monde.

Publiée par le maire de Marseille, Benoît Payan, sur le site Internet de la ville, cette pétition vise à interdire l’escale de certains bateaux lors des pics de pollution. Engagé depuis 2020 dans sa campagne pour réduire le commerce maritime, le maire a également arrêté les subventions au Club de la croisière. Une lutte compliquée puisque Marseille prévoit l’accueil de 1,8 millions de croisiéristes cette année.

Le Piana, ferry de la compagnie La Méridionale, peut naviguer entre la Corse et Marseille en émettant « zéro particule ». Les moteurs du navire sont équipés de filtres destinés à capturer 99 % des oxydes de soufre et éliminer les particules les plus dangereuses pour la santé. Selon le président de la compagnie, Marc Reverchon, cette solution est « une première mondiale ».

Pour réduire son empreinte carbone, le Grand Port maritime de Marseille investit plus de 50 millions d’euros pour connecter les navires à quai d’une façon électrique d’ici 2025. Ainsi, la moitié des 3 400 navires transitant par la cité phocéenne pourront être branchés à quai de cette façon. Cette décision va main dans la main avec la création d’une zone à faible émission d’oxyde de soufre en Mer Méditerranée à cette date, obligeant de la sorte les navires à utiliser un combustible avec au maximum 0,1% de soufre.