Jérôme, Audrey, Elisabeth, Elise, Olivier occupaient un emploi prestigieux et ont fait le choix de changer de métier. Le besoin de trouver un sens à son travail, est devenu plus fort que les chiffres sur son compte en banque.
Quand le salaire ne suffit plus
Occuper un emploi bien payé et prestigieux ne suffit pas toujours aux travailleurs qualifiés, qui veulent exercer un métier qui a du sens. Antoine Dain prépare une thèse en sociologie sur les mobilités professionnelles des travailleurs qualifiés. Selon lui, parmi les cadres et employés relevant des professions intellectuelles qui choisissent la reconversion, l’épanouissement personnel passe avant le salaire. Jérôme, 36 ans, le confirme: “je gagne 1400 euros et j’ai la patate quand je vais au boulot”. Passé par les bancs d’une école d’ingénieur, sa carrière était toute tracée. Et puis… Il a tout plaqué avant de soutenir sa thèse. Il s’est lancé dans un tout autre domaine : il a créé un café jeu, puis est devenu manager dans une brasserie à Cayenne. Depuis 2017, il dirige un escape game à Besançon. Olivier, 59 ans, ancien directeur d’étude pour la Métropole de Toulouse et propriétaire d’une maison d’hôtes depuis 2016, souligne, lui, que le sens de son travail se trouve dans la reconnaissance exprimée par ses clients, “ les gens sont contents de venir, la maison reçoit de bons avis”.
“Une routine dans laquelle je ne me retrouvais plus”
Changer de métier est une issue de secours pour certains actifs qui veulent échapper à la routine. C’est le cas d’Audrey, 32 ans, ingénieur pendant 6 ans, devenue professeur de mathématiques et de sciences dans un lycée professionnel. Pour elle, “le problème n’était pas le métier d’ingénieur mais le cycle dans lequel j’avais l’impression d’être ” car “on ne peut pas en faire plus ni moins dans ce métier et cela devenait une routine dans laquelle je ne me retrouvais plus”. Un nouvel environnement de travail permet à ces actifs d’être moins stressés et de trouver un meilleur équilibre de vie. “ Quand il m’arrive d’avoir des soucis, la cuisine me permet de les oublier », remarque Elisabeth, 50 ans, ancienne cheffe de service dans une structure pour les personnes handicapées mentales, devenue cuisinière dans un salon de thé. La plupart des reconvertis justifient leur choix par le besoin de voir le produit fini et de ne plus être un simple maillon de la chaîne. Elise, 22 ans, un diplôme d’ingénieur en poche, a bifurqué vers la cuisine après ses études : “c’est beaucoup plus concret, on voit tout de suite si tu es efficace ou pas”.
Une catégorie socioprofessionnelle qui possède des avantages
Si ces professionnels semblent réussir leur transition, c’est parce qu’ils possèdent un bagage culturel conséquent et ont donc plusieurs cordes à leur arc. Ils peuvent aussi changer de métier plus facilement puisqu’ils bénéficient souvent d’un apport, négocié avec leur précédent employeur, souvent doublé de certains avantages non négligeables : une formation, un accompagnement par Pôle emploi et des indemnités chômage parfois élevées, pendant deux ans. C’est le constat, réalisé par le gérant de chambres d’hôtes, Olivier “ : je n’étais pas trop mal loti, j’ai continué à percevoir le même revenu pendant 1 an, j’avais les moyens de redémarrer quelque chose. » D’ailleurs, ces derniers mois il voit fleurir dans son quartier de Toulouse des commerces, ouverts eux aussi par des reconvertis, “des trentenaires très diplômés qui en avaient marre de leur boulot et se mettent à monter des épiceries, des caves à vin”. Il y a quelques années, c’était les magasins de cupcakes et de soupes…