Un pantalon à 395 euros, 950 euros pour un blazer, un shopping à 2024 euros chez Maje. Derrière ces chiffres ? Les dépenses en notes de frais de la maire d’Aix-en-Provence Sophie Joissains depuis son arrivée à la tête de la ville en septembre 2021.
Le 22 mars dernier, Xavier Berne, créateur de Ma Dada, demande à la mairie d’Aix-en-Provence les notes de frais des maires Maryse et Sophie Joissains depuis 2020. Dans un souci de légalité, les documents sont communiqués en moins de deux mois par la ville, factures à l’appui. Les réseaux et les médias se moquent des sommes dépensées dans l’habillement et l’esthétique par l’élue actuelle et les critiques déferlent.
La représentation et la raison comme credo
Interrogée sur France Bleu Provence, Sophie Joissains assume tous ses achats. « À Aix-en-Provence, le conseil municipal alloue 15 000 euros par an à ces frais alors que dans les villes d’une même strate, normalement c’est 30 000 euros », explique-t-elle. Elle insiste sur la totale légalité des dépenses mais surtout sur le caractère raisonnable de ces dernières. « Je ne suis pas allée dans les boutiques les plus coûteuses et j’essayais d’y aller en périodes de soldes afin d’avoir des prix plus abordables », dit-elle. En somme, ce sont selon elle des dépenses réfléchies pour une maire qui se doit d’être impeccable.
Sophie Joissains n’apparaît donc pas embarrassée de ses achats. Raison de plus à cela : tous les maires n’ont pas transmis leurs notes de frais à l’association MaDada, contrairement à elle. Cette réponse rapide à la demande du site lui permet d’orienter son discours vers la transparence des élus et de garder une importante légitimité, même auprès de ses détracteurs. Mais face à cette palette d’arguments, qu’en pensent les Aixois ?
Ce qu’en pensent les Aixois
Côté citoyens, les avis divergent. Interrogés sur l’affaire, de nombreux passants – plutôt âgés –refusent de prendre la parole à ce sujet. C’est donc finalement du côté des jeunes étudiants que l’engagement et la critique ressortent. En période d’inflation et de pauvreté estudiantine, il semble inacceptable pour certains qu’une élue utilise l’argent du contribuable de cette manière. Amine, 23 ans, ne pèse pas ses mots : « c’est honteux, elle vit de la politique plutôt que pour la politique« . « Passer en frais de représentation des vêtements et surtout d’un tel montant, à mon avis ce n’est pas du tout nécessaire ni proportionné » s’insurge Claire, étudiante à Sciences Po Aix. Quant à elle, Alexandra remarque que son propre âge peut jouer sur ses jugements : « une veste à 950 euros nous ça nous paraît excessif parce que notre référentiel en termes de prix c’est la fast fashion, mais, en soit, ce sont les prix ». Quoiqu’il en soit, les trois étudiants soulignent la pertinence de rendre ces dépenses publiques dans un souci de légalité et de transparence.
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D’autres sont plus compréhensifs comme Fanny. Quadragénaire et mère aisée de deux jeunes enfants, elle est peu critique du montant des dépenses de Mme Joissains : « ce sont les prix pour s’habiller bien malheureusement« . En revanche, elle se dit favorable à de plus importantes réglementations et à l’idée « d’allouer des budgets précis à chaque catégorie de frais : habillement, restauration…etc.« .
Finalement, derrière cette histoire et ces dépenses somme toute légales, c’est le train de vie des élus et leur relation de confiance avec les citoyens qui interrogent. Les « affaires » politiques deviennent monnaie courante et semblent aggraver la fracture votants-élus sur fond de crise de la démocratie.
Marine Caron