Mise au point avec Jérémie Nollet : l’apparition du problèmes des boues rouges dans le débat public
Comment expliquer l’apparition soudaine de la problématique des boues rouges dans le débat public ?
Ce qu’il faut avant tout comprendre c’est que rien n’est mécanique. Un problème devient public seulement si on en parle. Une explication est celle de Philippe Garraud (politiste et directeur de recherche au CNRS) : la mise à l’agenda. Cette théorie met en avant le rôle des médias dans la fabrication d’un problème. Il pense que ce sont les médias qui focalisent l’attention du public sur tel ou tel enjeu, à un instant T.
Outre les médias, quels autres acteurs entrent en jeu ?
D’autres acteurs ont effectivement un rôle à jouer. Si les médias en parlent, c’est bien parce que quelqu’un a porté leur attention sur ce problème. Ce n’est pas Thalassa (émission diffusée le 5 septembre 2016) qui a fait des boues rouges un problème public : ce sont les acteurs politiques, associatifs, voire universitaires.
Dans quelle mesure ont-ils contribué à cette fabrication ?
Ségolène Royal et Manuel Valls, en tant qu’acteurs politiques nationaux, ont alimenté le débat sur la question. Leur opposition reflète deux choses : les luttes politiques internes au PS notamment en vue des élections, et leur position respective au gouvernement ; en tant que ministre de l’Écologie pour Royal qui se pose en défenseure des intérêts environnementaux, et en tant que Premier ministre pour Manuel Valls qui veille à protéger les emplois et à éviter une augmentation du chômage.
Les acteurs associatifs locaux (voir « Acteurs de la controverse ») ont également pu, à travers leur mobilisation, déclencher le traitement médiatique.
L’expertise enfin, via la publication d’un rapport par exemple, peut constituer dans certains cas un facteur de mise à l’agenda. Il faut donc aussi bien faire attention à ce qui a précédé la médiatisation qu’à la médiatisation elle-même.