Slim est bien placé pour parler du sujet, il a été contraint à l’exil lors de la «Décennie noire», période de terrorisme où plusieurs journalistes et dessinateurs ont trouvé la mort. Son ton est doux, son témoignage touchant : il parle de l’enfance, de sa passion pour le dessin… Slim est avant tout bédéiste, il a commencé à exercer à une époque où il était inenvisageable de devenir dessinateur de presse dans son pays.

Il publie sa première BD dès 1968 dans le quotidien El-Moudjahid, créant ses personnages désormais bien connus des Algériens. Alors que le dessin de presse constituait « une spécialité typique dans les pays démocratiques », ce n’est qu’à partir de 1989 qu’a lieu en Algérie la « naissance timide d’une presse libre » dont il est heureux d’avoir vu les débuts. La décennie à venir s’est avérée plus difficile. Et, contraint à l’exil au Maroc puis en France, il découvre ce qu’il appelle la «solidarité» entre dessinateurs. Les dessinateurs français ne savent pas la chance qu’ils ont de pouvoir aborder des sujets comme la religion, la sexualité ou la politique, ce qui n’est pas le cas en Algérie : « aucun de ces trois sujets ! Que nous reste-t-il alors ? Se creuser la tête pour essayer d’arracher un sourire au lecteur ».

L’Algérie, avec plus de quarante quotidiens, peut selon lui aujourd’hui donner de l’espace aux dessinateurs, bien que l’on soit moins libre de s’exprimer. Un amendement condamne notamment l’offense au président de la République ou aux corps de l’Etat et prévoit des peines pouvant aller jusqu’à un an de prison. Pour lui, « le manque de libertés démocratique dans ce pays force à l’autocensure qui rend l’artiste piètre et peureux ». A la question de savoir si le dessinateur doit se fixer des limites personnelles, il répond que « tout artiste a sa conscience, son vécu, sa sensibilité ». Il encourage ceux qui souhaitent dessiner à prendre le pinceau, « ne serait-ce que par le plaisir que procure le dessin, la magie du crayon sur une feuille vierge ».

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Anaëlle Soler