Le désordre, la violence, le bruit et la fureur : voilà les images auxquelles sont ordinairement associées les banlieues françaises dans les médias, et plus encore les quartiers nord de Marseille. En attestent les multiples reportages télévisés aux accents sensationnalistes, qui décrivent ces « quartiers chauds » comme de « hauts lieux de la délinquance », des « plaques tournantes du trafic de drogue », où les « jeunes des cités » imposent leur loi.

Cette focalisation tapageuse à l’égard de ces quartiers n’a pourtant pas toujours été la règle, comme l’explique Yvan Gastaut : « Pendant longtemps on a parlé de Marseille comme un tout, en agrégeant toutes les parties de la ville. Marseille apparaît aussi comme la ville de l’immigration. Dès que l’on veut un reportage sur l’immigration dans les années 1970, 1980, 1990, on va à Marseille, on ne va pas chercher ailleurs. » La rupture intervient à l’orée des années 80 : « Les représentations deviennent très négatives, on y associe des problèmes sociaux, un surcroît de délinquance, avec notamment les phénomènes de rodéos », ajoute l’historien.

Cette image peu reluisante va néanmoins connaître une embellie : « Fin des années 1980, début des années 1990, le discours se fait plus positif. C’est notamment le fruit d’une volonté politique de valoriser le cosmopolitisme, avec l’image d’une vie sociale solidaire et amicale. A tel point que l’on va dire que les quartiers nord de Marseille sont moins violents que dans des villes comme Lyon ou Paris », enchérie Yvan Gastaut.

Embellie finalement très passagère : « A partir des années 2000, l’image positive s’efface. Les phénomènes médiatiques font de Marseille un lieu où les relations interculturelles sont l’objet de crispations. Selon les médias rien ne va, la délinquance est forte, les trafics sont importants », poursuit l’historien.

Depuis quelques années, on observe cependant un « embellissement de Marseille, notamment à l’occasion de son accession au titre de capitale de la culture en 2013. » Une inflexion qui ne parvient pas encore à contrarier l’image médiatique tenace d’une « ville en déclin », conclut Yvan Gastaut

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Louis Giannotti