ChatGPT interroge sur la tricherie à l’école

Depuis son apparition pour le grand public, ChatGPT fait grincer les dents des grandes universités mondiales. Ses possibilités démesurées inquiètent et questionnent sur les risques de triche à l’école.

Au lycée Sacré-Cœur à Aix-en-Provence, dès la sonnerie, Sacha* s’empresse de quitter l’établissement avec ses amis. Muni de son carnet de correspondance, il leur montre avec bagou l’avertissement que sa professeure vient d’écrire. Il y a deux semaines, Sacha avait utilisé le nouveau logiciel, ChatGPT, lui valant un zéro à son devoir maison. L’un de ses camarades lui lance ironiquement : « Tu n’as pas été très futé Sacha, je vais t’apprendre comment bien l’utiliser. »

N’en déplaise aux petits malins, certains avaient anticipé, dès sa parution, son utilisation pour tricher. C’est le cas d’Elon Musk qui avait tweeté début janvier : « C’est un nouveau monde. Adieu, devoirs à la maison ! » Quelques semaines plus tard, de grandes Écoles l’interdisent dans leurs établissements : la ville de New York a notamment proscrit son utilisation dans l’ensemble de  ses écoles publiques. En France Sciences Po Paris, a aussi donné le ton en considérant son usage comme de la fraude.

Mais les lycéens n’ont pas attendu ChatGPT pour tricher. Preuve en est, Internet regorge d’outils simplifiant les recherches scolaires. Élève au lycée Émile-Zola à Aix, Mehdi* n’arrive plus à se souvenir du moment où il a commencé à s’aider d’Internet pour ses devoirs. Il explique avec sarcasme qu’il utilise, encore aujourd’hui, des logiciels plus anciens que ChatGPT : « Je suis honnête et je pense qu’on l’a tous déjà fait, on cherche sur Google les informations pour certains devoirs. Moi en anglais, j’écris directement sur DeepL [service de traduction linguistique automatique en ligne, NDLR] et je recopie bêtement. »

Un outil « génial »

À Émile-Zola, les lycéens ne partagent pas tous le même avis. Quand certains sont méfiants à l’idée de l’utiliser, d’autres racontent leur expérience en frimant. Devant son groupe d’amies, Élisa* détaille avec précision, telle une experte, la manière dont il faut l’utiliser : « En ajoutant des documents en plus, ça te donne des réponses très précises. C’est vraiment génial, au moins, ça permet d’avoir une bonne base, des bonnes informations, et après, tu modifies quelques phrases. »

Mais ChatGPT n’est pas seulement utile pour les devoirs scolaires. Passionné par le numérique, Lilian*, élève au lycée Sacré-Cœur, explique comment, grâce à cette intelligence artificielle fondée par OpenAI, il a pu avoir un programme informatique performant. À Émile-Zola, Émilie* se confie à l’écart de ses camarades de classe sur sa volonté de perdre du poids. En compagnie de son meilleur ami, elle révèle qu’elle a utilisé ChatGPT pour se construire un programme sportif et alimentaire. « Je l’ai pris en photo et maintenant faut que je le pratique, c’est le plus dur ça ! », lance-t-elle un peu gênée. 

Peur de la sanction 

Selon les bruits de couloir à Sacré-Cœur, un élève aurait été renvoyé après avoir utilisé ChatGPT. Cette rumeur lycéenne inquiète certains élèves qui ne souhaitent pas l’utiliser par peur de représailles après des avertissements de leurs professeurs. 

À Émile-Zola, les réactions des professeurs sont parfois surprenantes. Une des élèves, Emma*, déclare qu’elle a connu ChatGPT grâce à sa professeure : « j’ai une de mes professeurs qui nous a expliqué que ce ‘machin’ était génial ! Donc j’ai essayé. » Même si le lycée ne mène pas une politique anti-ChatGPT, les élèves sont conscients que la majorité des examens restent des devoirs sur table où c’est leur propre raisonnement qui sera noté par leurs professeurs. 

*Les prénoms ont été changés

Liza Cossard