À Marseille les retombées espérées des JO-2024, prélude aux Jeux d’hiver 2030 ?

REPORTAGE┃ 2030 semble encore loin, mais l’avenir des Jeux olympiques d’hiver suscite déjà bien des questionnements. Les JO-2024 en France pourraient offrir un avant-goût des retombées à venir. Zoom sur Marseille et son joyau, la Marina, qui accueillera cet été les épreuves de voile, pour entrevoir les impacts de ce grand événement sur le territoire français.

Tout près des célèbres plages du Prado, se dresse désormais un bâtiment flambant neuf. Base nautique inaugurée début avril, la « Marina » accueillera les épreuves de voile lors des JO d’été. Située dans les quartiers Sud chics de Marseille, une digue y a vu le jour, le bassin a été réaménagé et six bâtiments modernes ont été ajoutés.

Un espoir ravivé 


Face à ce joyau étincelant, de l’autre côté de la rue, une voix résonne : « J’aime à penser qu’il y aura des touristes, il y aura le monde entier qui va venir à Marseille notamment voir les plages du Prado et nous on est situés juste en face. J’espère qu’on va travailler, je le sens ! ». Lizzy, propriétaire du pittoresque restaurant La Dolce Vita, contemple le pullulement des badauds. L’ouverture de la Marina au public, le 2 avril 2024, a signé le retour de l’espoir pour cette restauratrice. Dès le samedi 5 avril, lors de la Journée Portes Ouvertes des locaux, les visiteurs ont afflué : « On n’a pas cassé la baraque mais on a quand même eu une trentaine de personnes qui venaient de la Marina », ajoute-t-elle.

D’autres commerçants attendent, eux aussi, avec impatience l’arrivée des touristes. Mohammed, patron du kebab David, est plus qu’enthousiaste : « On est sûrs qu’on aura des retombées, mieux que l’année passée. On voit déjà la différence ! ». Les travailleurs d’abord, puis les premiers amoureux du sport, ont commencé à défiler dans le fast food. Cet optimisme grandissant est partagé par les riverains. Catherine*, une Marseillaise de toujours, voit dans l’effervescence des Jeux olympiques une promesse de renouveau pour sa ville bien-aimée. Pour la quinquagénaire, « la Marina, c’est très chouette, c’est très joli, c’est un plus pour la ville ! ». Assis en terrasse, Elias* dissimule avec peine sa joie. La casquette vissée sur le front, il déclare : « Ça fait du bien de voir des nouvelles têtes, en plus des habitués. Je pense que les restaurateurs peuvent retrousser leurs manches : le travail arrive ! ».

Des travaux « destructeurs » pour le commerce


Si l’espoir est au rendez-vous, ce ne fut pas le cas pendant les travaux qui ont duré plus de deux ans. Projet de 7000 m2 de bâti et dont le budget initial était de 30 millions d’euros, une enquête de Marsactu révèle que les dépenses de la Marina s’élèvent finalement à 49,2 millions d’euros. Benoît Payan, maire de Marseille, désigne l’inflation et des travaux effectués en temps record afin de respecter les délais, comme fautifs de ce dépassement. De février 2022 jusqu’à son inauguration en avril 2024, les riverains en ont pâti. « Il y a eu énormément de travaux donc beaucoup de bruit, des mauvaises odeurs, de la poussière, des tractopelles, des camions… », se rappelle Lizzy, secrétaire de l’association des commerçants Prado-Plage David. « Zéro client, malheureusement » : pendant les travaux, la gérante a eu du mal à faire fructifier son commerce et le chiffre d’affaires du restaurant a avoisiné celui de ses clients.


Quid des retombées économiques pour la ville ? 


Au-delà des sentiments partagés des habitants, se posent des questions cruciales sur les retombées économiques et sociales des Jeux. En réponse à ces préoccupations, Laurence Astier, responsable communication de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur pour les Jeux assure que les JO seront une aubaine pour Marseille qui « sera vraiment au centre du monde le temps d’une journée », lors de l’arrivée de la flamme olympique le 8 mai et sa déambulation dans la ville le 9. « Les JO vont permettre à Marseille de s’inscrire comme une ville capable d’organiser de très grands événements », affirme la communicante. Finalement, la cité phocéenne peut espérer recevoir « 650 000 personnes pour les matchs de foot » pendant toute la compétition et « 12 000 places par jour ont été vendues pour la voile, ce qui représente 150 000 billets ». 

Au total, la Chambre de Commerce et d’Industrie PACA estime que les retombées économiques et touristiques s’élèveront à près de 100 millions d’euros pour la ville de Marseille. Un chiffre impressionnant, mais qui soulève également des questionnements quant à l’utilisation future de la Marina. Laurence Astier, reprenant les déclarations de Benoît Payan, assure que ces bénéfices profiteront à tous les citadins et, à terme, la Marina « sera rendue aux Marseillais ». Dans un geste symbolique, les clefs seront restituées à la ville de Marseille, qui souhaite ouvrir au plus grand nombre les activités nautiques après les Jeux.

 
Salomé NEFTI

*Prénoms modifiés