Y aura-t-il encore de la neige dans les Alpes en 2030 ?  

À court terme, la pratique des sports d’hiver pourrait être compromise, et, à long terme, probablement impossible. C'est ce qu'explique Joël Guiot, directeur de recherche au Centre Européen de Recherche et d’Enseignement en Géosciences de l'Environnement (CEREGE, Aix-Marseille Université), pour qui les prévisions climatiques laissent présager un très faible taux d’enneigement dans les Alpes en 2030.

Les effets du réchauffement climatique se font sentir dans le monde entier, mais plus particulièrement dans les montagnes, notamment les Alpes. À long terme, les effets sont particulièrement frappants.

Joël Guiot –qui a réalisé de nombreuses recherches portant sur l’impact des changements climatiques passés, présents et futurs sur les écosystèmes méditerranéens– citant l’article « Évolution de l’enneigement dans les Alpes du Sud entre 1971 et 2019 » paru sur Grec-Sud, explique que les effets seront considérables d’ici 50 ans. « En moyenne altitude, il y aura une diminution d’un peu moins de 50 cm de la hauteur maximale de neige. Pour la durée de neige au sol, la perte est de 35 jours, soit un peu plus d’un mois. Au-dessus de 2000 m d’altitude, l’impact est plutôt moins sensible, avec 15 cm de perte en hauteur moyenne et 45 cm en hauteur maximale. La durée de neige au sol n’a perdu que 5 jours en haute altitude ».

Mais peut-on sentir ces effets à plus court terme, dans 6 ans, notamment en vue des Jeux olympiques d’hiver de 2030 ? Joël Guiot est assez pessimiste : « Nous pouvons considérer que le 1.5°C sera atteint dès 2030 et le +2°C en 2050. Pour 2070, ce sera sans doute de l’ordre de +3°C. Il s’agit ici de la température moyenne mondiale et pas celle des Alpes qui, elle, sera nettement plus élevée ».

Interrogé sur la pertinence d’organiser des Jeux olympiques d’hiver dans un tel contexte climatique, le chercheur est catégorique.

« L’organisation des JO d’hiver en PACA et Rhone-Alpes est un non sens ! ». Au-delà de la question de l’enneigement, Joel Guiot alerte sur d’autres problématiques écologiques : « Il faudra avoir recours à la neige artificielle qui demande de grosses ressources en eau et beaucoup d’énergie. À cause de la diminution de l’enneigement et des glaciers de montagne, cette eau deviendra de plus en plus rare. Et je ne parle pas des émissions de gaz à effet de serre induites par les visiteurs des sites olympiques. Aussi, si la température reste au dessus de 0°C pendant les Jeux, ce ne sera même pas possible de garder cette neige artificielle à l’état solide ».


En dehors du contexte des Jeux olympiques, il soulève finalement la question des sports d’hiver de manière générale.

« Je pense que de toute façon, la pratique des sports d’hiver est compromise bien avant la fin du siècle. Si l’organisation des JO se veut une entreprise de publicité pour un sport qui n’en a plus longtemps à exister, c’est de l’argent gaspillé pour rien et qui serait beaucoup plus utile pour préparer la reconversion de nos stations d’hiver », lâche-t-il.


De l’autre côté, de nombreux politiques comme Renaud Muselier, président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur, se défendent des accusations d’un impact écologique colossal pour ces Jeux. « En désignant les Alpes françaises, le Comité international olympique nous fait confiance pour réaliser des Jeux responsables entre neige et chalet », a-t-il déclaré à France Info le 28 janvier 2024.
 

Manon RASPLUS